Une AG mobilisée et engagée

24 juin 2025

Notre assemblée générale statutaire de ce 10 juin a rencontré un vif succès. La FESEFA tient à remercier chaleureusement ses membres pour leur contribution à la réussite de cet événement ! L’espace de discussion collective sur les politiques austéritaires fut particulièrement riche en débats et en réflexions. Nous essayerons ici d’en reproduire succinctement la teneur.

Afin de répondre aux préoccupations exprimées par nos membres, et de tenter de dépasser la sidération face aux attaques envers notre modèle social, nous avons proposé la tenue d’un moment d’échanges et de discussion sur les politiques austéritaires et la bataille idéologique.

Pour cadrer le débat, nous avons eu le plaisir de bénéficier de l’expertise de Jacqueline Fastrès, de l’asbl RTA, qui nous a présenté un exposé conceptuel introductif basé sur deux analyses des projets de la majorité Arizona et leurs impacts[1], corédigées dans le cadre de l’action d’éducation permanente de son association.

La première analyse[2] distingue, sur la base du travail du sociologue Robert Castel, trois types de propriétés :

  • La propriété de soi, qui renvoie aux aspects de maîtrise de sa propre vie ; être libre, propriétaire de son propre corps, de sa propre vie, de sa destinée.
  • La propriété privée, qui concerne la possession concrète de richesses, au sens large : richesses matérielles, mais aussi immatérielles, culturelles, affectives et relationnelles, etc.
  • La propriété sociale, propriété de ceux qui ne sont pas propriétaires, construite par les luttes sociales, qui englobe la sécurité sociale, les services publics, les corps intermédiaires.

La deuxième analyse[3] montre comment ces trois types de propriétés sont mises à mal par les politiques austéritaires des différents gouvernements :

  • La propriété de soi, par un net recul du principe de choix consacré par l’article 23, 1° de la constitution ;
  • La propriété privée ou ses équivalents, à savoir des sources de revenus et de supports permettant une indépendance et une autonomie, par la multiplication des emplois flexibles et leur adoption contrainte ; mais aussi par la négation de la valeur de la force de travail des travailleurs, alors même qu’ils ont contribué à l’expansion de leur entreprise ;
  • La propriété sociale, avec le détricotage de la sécurité sociale, en matière de chômage, de santé, de pension, niant ici aussi l’article 23 de la constitution, qui consacre en son alinéa 2 « le droit à la sécurité sociale, à la protection de la santé et à l’aide sociale, médicale et juridique ».

Ces analyses mettent en évidence un affaiblissement systématique de principes démocratiques constitutionnels essentiels et des mécanismes de solidarité que les mouvements sociaux ont mis tant de temps à construire.

Dans son exposé, Jacqueline Fastrès a déploré les attaques contre les corps intermédiaires, et souligné que l’ensemble des secteurs est aujourd’hui impacté d’une manière ou d’une autre par ces évolutions politiques. Elle conclut par un plaidoyer pour renforcer les collectifs (au travail, en EP, etc.), plus que jamais indispensables, pour consolider la collaboration entre les services publics et l’associatif et pour lutter contre la sémantique orwellienne du gouvernement Arizona.

Sur cette base, les mandataires de nos associations membres, organisés en sous-groupes, ont appelé, notamment à :

  • résister contre le transfert des moyens dévolus au non marchand vers le secteur marchand ;
  • dénoncer le dénigrement de l’action associative ;
  • affirmer la légitimité des actions des associations et lutter pour le maintien de leur financement ;
  • veiller à la diversité des associations et des publics ;
  • renforcer les solidarités intersectorielles, décloisonner les cadres et les décrets (mais pas dans une perspective de rationalisation) ;
  • favoriser la solidarité entre associations ;
  • être prêt à réagir dans l’urgence mais aussi poursuivre un travail de moyen terme sur de nouveaux récits pour aller chercher les hésitants (notamment sur la soi-disant efficacité du marchand par rapport au non marchand) ;
  • faire acte de résistance en réclamant plus de respect des cadres légaux ;
  • arrêter d’être dans une forme de réaction mais avoir une défense commune ;
  • rester politique ;
  • tenir un discours sur l’associatif et sur l’EP en particulier : plaidoyer vers les cabinets, campagne de communication grand public ;
  • renforcer les narratifs avec plus de lien entre axe 1 et axe 3 (EP) ;
  • questionner le fondement de la simplification administrative et de la numérisation pour ramener du lien humain et des rapports entre individus ;
  • rester vigilant sur le fait de garder du lien (en opposition au temps dépensé en lourdeurs administratives) ;
  • réseauter et être en lien pour s’assurer d’avoir des référentiels communs ;
  • ouvrir une troisième voie entre contestation et collaboration.

Dans sa conclusion, Jacqueline Fastrès a insisté sur l’importance de (re)faire lien, de renouer avec les organisations syndicales.

Le mot de la fin fut pour notre directrice, Farah Ismaïli, qui a évoqué les actions passées et à venir, en enjoignant les directions à soutenir la participation des travailleurs et travailleuses aux mobilisations. La mobilisation des acteurs de terrain de première ligne dans la rue donne en effet une assise au travail institutionnel de la FESEFA dans le cadre de ses négociations.


[1] Ces deux textes sont les premiers d’une série à retrouver sur le site d’Intermag : https://intermag.be/analyses-et-etudes

[2] Le programme de la coalition « Arizona » et des autres gouvernements belges : des attaques inédites et cumulées contre la « propriété sociale », Jacqueline Fastrès, Anne-Sophie Fontaine et Philippe Mahoux, RTA asbl, février 2025

[3] Sens et contresens du travail – les décisions de la coalition Arizona, une sape des propriétés des travailleurs, Jacqueline Fastrès, Anne-Sophie Fontaine et Philippe Mahoux, RTA asbl, avril 2025